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Les pièges des drogues douces.

INTERVIEW


Monsieur Dominique MORIN


Damien Meerman : Après être sorti de la drogue, de la violence et de l'errance sexuelle, vous avez appris que vous étiez malade du sida. Aujourd'hui, vous dénoncez le piège des drogues dites " douces " . Quelle a été votre première expérience de la drogue ?

Dominique Morin : J'ai d'abord découvert le cannabis dans des concerts de rock. A l'époque, je vivais un certain mal-être : absence de père, échec scolaire et angoisses existentielles. Le cannabis était proposé par les groupes de rock comme une expérience nouvelle et faisait partie d'une panoplie de rebelle, ce qui suffit à tenter un adolescent de 17 ans en crise. Et de fait, avec le cannabis, je me suis senti bien, au moins en apparence et à courte vue et j'ai eu l'impression d'exister. Je devenais subitement le héros d'un film. Fumer un joint me permettait de ressentir des sensations, d'apaiser mes tensions et d'oublier mes inhibitions. Ensuite, j'ai fréquenté d'autres fumeurs, je n'étaits plus seul. Puis, je suis entré dans un monde marginal avec ses rites et ses voyages initiatiques.

Damien Meerman : Pourquoi s'agit-il d'un piège ?

Dominique Morin : Contrairement à l'héroïne, le cannabis n'est pas une drogue qui a une image négative. On a le sentiment de pouvoir quand même assumer sa vie. De plus, le cannabis paraît une sorte de " médicament miracle " contre le mal de vivre. Il donne l'impression d'un bien-être, d'avoir des amis, alors que si ses effets anesthésient le malaise, qu'il rapproche ponctuellement et par intérêt égoïste les fumeurs, il empêche de chercher la solution à ses problèmes en permettant de les fuir et d'oublier la vie réelle. L'illusion paraissant plus belle que la réalité pourquoi se heurter à une vie avec ses combats, aux succès fragiles et aléatoires?

Damien Meerman : Mais le cannabis n'est-il pas officiellement classé comme une drogue "douce" ?

Dominique Morin : C'est là que réside le piège, car le cannabis n'est pas une drogue isolée. Tous les drogués sont entrés par le shit dans un gigantesque supermarché ou tous les produits possèdent la même vertu magique de vous faire oublier les galère de la vie. Le fumeur de cannabis veut se sentir bien temporairement et prend goût à ces sensations. De plus, il faut le dire, un jeune qui est sensible aux effets du shit est souvent fragile au départ. C'est pourquoi il est plus vulnérable qu'un autre à l'égard de tous les produits capables du même résultat voire "mieux " : ecstasy, cocaïne, amphétamine, héroïne etc.
L'influence d'une personne peut être déterminante s'il hésite encore. Ce fut mon cas pour l'opium, le speed, l'héroïne, la cocaîne et autres drogues. En fumant un joint la première fois, le jeune croit souvent faire une expérience sans lendemain. Mais les occasions reviennent et la tentation peut rencontrer une faiblesse personnelle : un mal-être, une angoisse. Chez certains jeunes, cette rencontre sera explosive. Le simple vide intérieur est plus que suffisant pour céder à cette tentation de fuir la réalité sans oublier les occasions omniprésentes aujourd'hui…
En France rappelons que 9O % des toxicos " durs "ont été initiés aux drogues par le cannabis. Aujourd'hui, la drogue est partout, le cannabis circule de plus en plus dans les lycées et les petites fêtes entre amis.

Damien Meerman : Comment les parents peuvent-ils aider leurs adolescents à ne pas tomber dans ce piège ?

Dominique Morin : Beaucoup de parents font semblant de ne pas savoir. Je connais deux jeunes dont les parents ont trouvé du shit dans leurt chambre. Le père de l'un d'eux a dit à son fils : " j'ai trouvé ça dans ta chambre " et lui a rendu avec " indulgence ". L'autre lui a dit : " je l'ai mis à la poubelle ". Dans le premier cas, la faiblesse du père encourage le jeune à continuer. Dans le second, le père donne à son fils une chance d'arrêter. Je ne veux pas accabler la faiblesse de certains parents, car elle part souvent d'un bon sentiment face à une situation d'impuissance. Mais si on ne dit pas la vérité à un jeune, il a moins de chances de s'en sortir. La démission éducative des adultes est toujours une injustice car ce sont les jeunes qui en paieront le prix.. Parler avec eux peut toujours être utile et permet maintenir le contact. En cas de galère ce sont bien souvent vers les parents qu'ils reviendront.
Sachez alors être indulgent, afin de lui permettre de franchir votre porte. Rappelez-vous aussi que la drogue est présente partout pour un jeune, que ses idoles se vantent de se droguer et que la société a renoncé, dans une certaine mesure, à les protéger par une prévention efficace. Votre réaction doit être juste mais ferme et doit prendre en compte cette réalité. N'ayez aucune complaisance envers le cannabis qui est un poison de l'esprit bien plus qu'il ne l'est du corps mais ayez une grande indulgence envers la personne, c'est-à-dire le fumeur.

Damien Meerman : Vous avez contracté le sida en couchant avec une fille, héroïnomane, qui est morte depuis. Vous vous consacrez aujourd'hui à parler à des jeunes du sida et de la drogue. Pensez-vous que les deux phénomènes soient indissociables ?

Dominique Morin : En effet, la drogue induit des comportements, en particulier des comportements sexuels, qui multiplient les risques d'attraper le sida. Or il existe une véritable promotion de la drogue dans notre société. J'en ai pris conscience un jour en découvrant le rayon sur la drogue d'une des plus grosses librairies de France. Les huit-dixièmes des livres font l'apologie du cannabis et il existe des maisons d'édition entièrement consacrées à cela. Sur le plan immunitaire le cannabis affaiblit les défenses de l'organisme et sur le plan de la conscience il diminue la capacité de prudence et de réaction face à un comportement à risque.

Damien Meerman : Quel discours tenir des jeunes tentés de fumer du cannabis ?

Dominique Morin : S'adresser d'abord à leur intelligence sans la pression du groupe si cela est possible car l'instinct grégaire est immense parmi la jeunesse et sans tomber dans le piège d'un faux débat qui éloigne de l'essentiel. Ne pas dramatiser ni culpabiliser mais oser secouer la torpeur et surtout le respecter etle considérer. Je suis parfois moqueur lors de mes témoignages pour faire passer le message mais jamais irrespectueux. L'attitude du fumeur de cannabis est irrespectueuse envers lui-même, à l'égard de qui il a des devoirs, comme il en a aussi envers les autres, ceux qui l'aiment et ceux avec qui il vit. Les avantages à courte vue ne règlent rien des vrais problèmes. La vie est un combat enthousiasmant bien que difficile. A chaque moment il faut faire des choix, en toute liberté. C'est cette liberté de faire des choix, peut-être de se tromper, mais d'agir sur notre vie qui assure sa dignité à l'homme. Un jour il parvient à construire, avec les autres, une existence qui mérite ce nom. Chacun peut y parvenir. Il suffit d'écouter battre son coeur, d'ouvrir ses yeux et de se mettre en marche. Nous qui avons le souci de l'autre, parce que nous avons eu d'abord le souci de nous-mêmes, en nous respectant, soyons déjà des témoins que la vie vaut la peine d'être vécue en toute vérité, en toute liberté. Aucune sensation d'aucune drogue, aucune quête hédoniste, ne vaudra jamais la joie de se savoir aimé et de savoir aimer.



09/07/2007
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